Selon la position de l'observateur, l'objet ambigu, créé par Kokichi Sugihara, se présente de trois manières différentes.
Le problème des enquêtes sans cadavre, c'est qu'il n'y a pas véritablement de scène de crime, donc on s'accroche au moindre élément matériel pour tenter de remonter le fil des événements et de constituer un scénario probable des faits.
Lorsqu'une personne "se volatilise" (disparaît sans laisser de trace), on peut ouvrir une enquête pour disparition inquiétante ou une recherche dans l'intérêt des familles. Si l'enquête conduit à soupçonner un homicide, il faut, avant de formuler une accusation, rassembler des éléments probants notamment matériels, par indices (présomptions), testimonials, pour établir si la personne disparue a bien été assassinée.
À l'aube de cette nouvelle année 2019, que peut-on espérer apprendre davantage en examinant les documents rassemblés à propos de l'affaire MC, et en particulier les PJFiles ? Malgré un certain acharnement, je n'ai rien trouvé indiquant que l'enquête initiale a mal interprété les éléments de preuve. Ceux-ci suggèrent qu’il n’y a pas eu d’enlèvement et que Madeleine a pu mourir dans l'appartement 5A. Les enquêteurs n'ont pas pu prouver cette hypothèse, pour plusieurs raisons qui ne sont pas attribuables à une éventuelle incompétence. Au reste personne n'a réfuté les conclusions provisoires de la PJ.
Y a-t-il autre chose en jeu que l'attente maintenant ? Un jeu d'attente en quelque sorte, ponctué de questions.
Saura-t-on jamais si elle a été rejetée ou jugée recevable et sur quel fondement en fait de violation de droits de l'homme consacrés par la Convention ? La question étant de savoir si l’État portugais a privé les MC de l’un de leurs droits fondamentaux au titre des articles 6, 8 ou 10. Tout élément prouvant que le Portugal a privé les MC de leurs droits fondamentaux doit provenir des comptes rendus de la procédure devant les tribunaux portugais. Ces données sont donc très pertinentes.
Le principe de subsidiarité sous-tend la tâche de la Cour : en effet, il incombe aux juges nationaux d’évaluer les violations des droits garantis par la Convention, et l’intervention de la Cour ne commence que lorsque les voies de recours internes effectives ont été épuisées.
Autrement dit, les requérants doivent avoir donné aux tribunaux nationaux l'opportunité de traiter des violations des articles. Les MC ont donné aux tribunaux deux exemples de violation de l’article 6, mais les juges ne les ont pas considérés comme légitimes. Dans leur requête auprès de la CEDH, les MC doivent utiliser les mêmes exemples, sinon ils n'auront pas donné aux tribunaux nationaux la possibilité de réparer la violation alléguée.
Comment leur droit à la présomption d'innocence aurait-il été lésé? Est-ce parce que GA avait manqué au devoir de réserve ou parce que l'ordonnance de classement équivalait à un acquittement? Ils ont utilisé les deux arguments et les tribunaux ont rejeté les deux.
Le juge de première instance a dit:
Il est important de garder à l'esprit qu'il n'est pas illégal de soutenir la thèse selon laquelle MMC serait décédée dans l'appartement de Praia da Luz et que son corps aurait été dissimulé par ses parents. L'objet de l'action en justice est l'affirmation, par le défendeur Goncalo Amaral, dans le livre, l'interview et le documentaire, dans les termes concrets qu'il a utilisés, de cette même thèse. La juge n'a pas décidé contre Amaral à cause de ce qu'il a dit, mais à cause de qui il était.
On voit combien il peut être difficile d'obtenir des preuves suffisantes pour poursuivre un suspect. HOLMES est lent et difficile à manier. La base de données autonome utilisée par l'équipe de Sutton permet de rechercher rapidement les informations.
L'épisode le plus choquant est celui où Sutton doit passer un accord avec News of the World qui menace de divulguer l'affaire (une fuite interne probablement sur laquelle la série ne s'attarde pas) alors que les enquêteurs réunissent des preuves sans lesquelles la garde à vue sera inopérante.
Lorsque les responsables de Operation Grange ont annoncé qu'ils allaient enquêter sur l'affaire MC comme si cela s'était passé au Royaume-Uni, ils semblent avoir compté sur les méthodes modernes pour résoudre l'affaire, mais ils n'ont eu ni vidéo-surveillance (technologie qui pèse très lourd dans les enquêtes britanniques, proscrite au Portugal dans le domaine public), ni informateur. Quant à la téléphonie mobile, les juges portugais ont interdit au ministère public, qui l'avait sollicité, de prendre connaissance de tout contenu antérieur à une autorisation de mise sous écoute.
SY a dès le départ fondé ses travaux sur une préconception, une prise de position formée d'avance. Ce n'est pas ainsi que les enquêtes sont censées commencer, sauf dans les régimes totalitaires. D'où l'étonnement. Cette attitude a amené les enquêteurs britanniques à suivre certains indices qui cadraient avec leur préjugé et à ignorer les autres. Il est difficile d'imaginer qu'ils parviendront ainsi à découvrir le fin mot de l'histoire.
Sur Colin Sutton, voir son entretien avec Martin Brunt (SkyNews) à propos de l'affaire MC.
Sur l'avantage des CCTV, voir l'entretien avec l'ex-DCI Mick Neville.
08 – Companies House publie pour la période 31.03-2017/2018 les comptes de MF Fund, qui a le statut de "petite SARL" depuis mars 2016. Voir les (maigres) détails ici.
11 – Au Texas (San Antonio) est découvert le corps d'un bébé (8 mois) prétendûment enlevé le 4 janvier. Le père avoue accident et mise en scène.
12 – Fin de l'aventure à la fois amère et instructive dans le curieux monde des auto-proclamés modérateurs de la presse britanniques, pour ne pas mentionner IPSO. On y glisse comme sur une toile cirée, le sophisme y est roi et les faits la cinquième roue du carrosse. En anglais ici ou là.
– Publication de The Annual Report on the Recognition System de la presse, tel qu'il a été défini par The Royal Charter, d'où il émerge que seule le régulateur IMPRESS (qui ne regroupe que de petits journaux locaux) obéit aux règles. IPSO a déclaré n'avoir demandé aucune reconnaissance ou évaluation de son travail, ite missa est donc. L'organisme de traitement des plaintes n'est pas responsable de l'Editor's Code of Practice, comme le recommandait Lord Leveson (critère 7 de la Charte). C'est le comité du code de pratique des rédacteurs commande et ce comité est dominé par les rédacteurs...
– Publication de The Caircross Review - A sustainable future for Journalism. Ce rapport indépendant présente un aperçu des défis auxquels est confronté le journalisme de haute qualité au Royaume-Uni, en recommandant des mesures afin de sécuriser son avenir.
14 – La Chambre des Communes publie le rapport final de l'enquête menée par le (maintenant on ajoute "Digital") Culture, Media and Sport Committee sur les fake news et lancée il y a deux ans. Ma communication, datée du 2 mars 2017 et gardée confidentielle jusqu'à présent (lire ici), cherche surtout à montrer que le terme "fake news" ne s'applique qu'à de l'infox débuscable par tout un chacun, pour peu que l'on tienne à la vérité.
Les "Fake News" ne sont pas un phénomène nouveau et ne sont ni nécessairement liées à l'usage d'internet ni limitées aux périodes électorales comme semble le penser le législateur français.
Il est de plus en plus clair que les médias, les autorités gouvernementales et les forces de police ont des liens étroits. Les médias ne se cachent plus d'être les agents de propagande des dirigeants, si besoin est et pas seulement, au lieu d'exercer le contrôle que l'on attend du 4è pouvoir. Désormais, ceux qui tentent d'informer les utilisateurs d'Internet sont régulièrement la cible d'attaques. Moins parce qu'il leur arrive de répandre de fausses nouvelles que parce qu'ils répandent des informations que les autorités ne veulent pas faire savoir. L'idée qu'il est facile de duper le public est aussi commune que fausse. Ne pas protester ne signifie pas nécessairement que l'on est dupe et peut signifier que l'on se moque de ce que disent les dirigeants et les médias.
16 – IA : après les deepfakes, qui devraient inciter à la plus grande méfiance face aux images véhiculées sur les réseaux sociaux (et pas seulement), voici GPT-2, le générateur de texte trop performant pour être rendu public ! il ne faudrait pas, selon le groupe de recherche OpenAI (co-fondé par Elon Musk) qui l'a produit, qu'il tombe dans de mauvaises mains.. Quelle accroche!
Le chien "qui n'a pas aboyé" est une référence claire à Sherlock Holmes. Quid alors quand Eddie aboie ?
21 – Le journaliste australien Mark Saunokonoko (9News) met en ligne le premier épisode, "Ils l'ont prise", de la série de podcasts audio "Maddie", qui explore ce que beaucoup pensent être l’histoire de la disparition de Madeleine MC, une disparition dont on est convaincu connaître les circonstances sinon les modalités. MS enquête sur les preuves qui pourraient conduire à remettre en question tout ce que l'on croit savoir sur l’affaire. Il est au moins roboratif que la croyance soit interrogée, elle qui joua un rôle si crucial et divers dans le phénomène "Madeleine MC".
26 – Zoe Mc Callum publie Journalism vs Churnalism où elle remarque que le rapport du DCMS et la Cairncross Review, publiés récemment (voir ci-dessus), préconisent une contrainte réglementaire de "haute qualité" pour les contenus et qu'aucun n'est normatif en fait de transparence, laissant le soin aux géants de la technologie de développer leurs propres outils. Révélateur car, particulièrement en ce qui concerne l'infox, cette tâche pratique est de loin la plus difficile. Un algorithme peut-il être programmé pour détecter la désinformation ?
La CEDH publie en ligne "Comprendre les statistiques de la Cour".
Des voix sceptiques s'élèvent car SY ne communique rien depuis des mois : OG existe-t-il toujours ? L'intérêt de faire croire que oui est d'interdire les réponses aux FOI (Freedom of Information requests) sous prétexte que l'enquête est en cours.
04 – Second épisode, Chiffons rouges, de la série de podcasts audio "Maddie". Mark Saunokonoko signe ce True Crime Investigation et The troubling and perplexing case of Madeleine MC : What happened to Maddie in quiet seaside town ? ainsi que Inside of apartment 5A et aussi Gerry MC's changing routes on night Maddie vanished : does it matter ? et encore Timeline : what happened on the night Madeleine MC vanished ?
Les commentaires de Peter McLeod, un ex-surintendant de la police du Nottinghamshire qui a réfléchi sur l'affaire MC déclenchent la production en cascade, dans les red tops, de pratiquement le même article citant les critiques acerbes d'un "ami de Kate MC", probablement Clarence Mitchell, comme d'habitude. Sur "Peter Mac", voir d'abord ici, puis continuer.
Palindrome ! |
L'attitude des MC, qui réagissent comme si l'enjeu avait été "la recherche de MMC", rappelle leur réponse quand Bill Turnbull et Sian Williams (BBC News - Breakfast) les questionnèrent sur leur position vis-à-vis de la reconstitution demandée par le ministère public (clip ici et transcription là) :
En mai 2018, SY aurait recommandé aux MC de ne pas donner d'interview afin de ne pas nuire à l'enquête, une mise en garde étalée dans The Sun. Vrai ou faux, les MC avaient déclaré sur leur site qu'ils ne savaient plus quoi dire.. En réalité ils savent qu'ils ne contrôlent plus l'information, que leurs déclarations sont examinées à la loupe par leurs détracteurs et que le silence est un moindre mal. Quant au fait que le documentaire de Netflix "pourrait nuire à l'enquête de Operation Grange", on songe, par exemple, au documentaire d'Emma Loach tourné début 2008, alors que l'enquête portugaise était en cours, pour ne rien dire des actions des enquêteurs privés.Gerald MC - ... Je dois dire que la perspective de revenir avec des médias essayant de regarder une reconstitution ne nous attire pas et nos émotions, pour nous ... pour considérer que .. Je pense qu'il y a aussi d'autres problèmes ..Kate MC hoche la tête.GMC - Combien d'informations supplémentaires obtiendrions-nous, un an après, vous savez, et nous avons tout dit à la police.KMC - Si nous pensions que cela aiderait à retrouver Madeleine... c'est là le problème en réalité..
Et puis, si une enquête active était en cours pour retrouver MMC, les MC et la police n'interdiraient-ils pas de diffuser la série ?
12 – On célèbre avec juste reconnaissance les 30 ans du WWW.
Le Guardian suggère que Netflix n'a pas réussi à contacter les personnages-clefs de l'affaire. Il est possible que les principaux protagonistes aient été dissuadés par SY de participer à une entreprise aussi hasardeuse car tout ce qu'ils ont fait jusqu'à présent a été, à la suite de l'identification du prétendu ravisseur, de susciter des questions pour lesquelles ils n'ont fourni aucune réponse. Pas plus que les MC, qui n'ont jamais commenté la "perte" de leur seul élément de preuve.
14 – Lancement de la bande-annonce du documentaire Netflix en huit épisodes d'une heure, sobrement intitulé "The disappearance of Madeleine MC", dont le premier sera diffusé le lendemain. Pas de trompette sensationnaliste promettant des révélations, mais, compte tenu des personnes interrogées, il ne faut guère s'attendre à de nouveaux points de vue.
Chaque épisode aurait coûté 2 millions d'euros, ce qui scandalise (mais un épisode de Game of Thrones en coûte 15), s'ajoutant à l'argent public déjà dépensé sans résultat. S'il y a une chose que démontre le traitement de l'affaire MC, c'est que l'argent ne sert à rien si les "victimes" ne collaborent pas avec les forces de police, par exemple en répondant aux questions des enquêteurs ou en n'esquivant pas une reconstitution demandée par le parquet. Pour ne rien dire de l'argent public jeté par les fenêtres lorsqu'une équipe chargée de ré-examiner le dossier puis d'investiguer fait l'économie du commencement et part d'emblée et exclusivement sur la piste d'un ravisseur, dont l'invisibilité et l'intangibilité n'en remettent pas pour autant en cause l'existence au fil du temps qui passe.
La presse évidemment saisit l'occasion de titrer grand... Voir ici (Une bombe documentaire affirme que Madeleine McCann "est toujours en vie"), là (Est-ce dans l'affirmation selon laquelle l'enfant portée disparue est "toujours en vie" qu'il faut la chercher ?) et là encore (Le documentaire de Netflix sur Madeleine McCann pourrait inciter ses parents à assigner à nouveau en justice) et encore ici (Madeleine McCann vivante après avoir été enlevée par des trafiquants) et là on ajoute parce qu'elle était blanche et de la classe moyenne.
Après tout qu'importe la vérité des faits ? Aussi longtemps qu'un documentaire promeut la croyance orthodoxe, "politiquement correcte", la production sera soutenue et défendue.
Dans la version française, "La disparition de Maddie McCann"
Summers & Swan, déroulant un story telling biaisé par le point de vue exclusif du kidnapping, font office de narrateurs récurrents. Songer que Summers a écrit The File on the Tsar où certains des derniers Romanov n'auraient pas été assassinés à Ekaterinburg et Goddess: The Secret Lives of Marilyn Monroe, où la star aurait été victime d'une conspiration... De là à voir des complots partout en général et dans l'affaire MC en particulier, il n'y a qu'un pas, franchi plus souvent qu'à son tour. Ainsi de la nièce de Pamela F (CT) voyant un homme sortir du patio des MC, en fait du patio du 5B (probablement Matthew O qui y séjournait). Ainsi du ravisseur s'introduisant la veille du drame pour repérer les lieux ou pour agir mais, dérangé, se jurant de revenir le lendemain, équipé de sédatifs. Même Enid Blyton n'aurait pas osé, et c'est à des enfants qu'elle destinait ses "famous Five".
Il n'est guère surprenant que, selon la production Netflix, l'enquête de la PJ n'ait rien mis à jour puisqu'elle s'inspire largement de Summers et Swan qui, à l'instar des MC, en ont une fort piètre opinion. Ce qui est intéressant c'est qu'aucun fait n'a été présenté pour étayer cette idée-là.
Un certain Neil Berry en quête de ses 15', affirme que MMC avait plongé d'un bateau, le 3 mai au matin, pour récupérer le chapeau de sa fille qui était tombé dans l'océan ! Si MMC était tombée à l'eau elle aurait eu un choc thermique car l'eau était froide (16°) et il aurait été étonnant que les parents n'en soient pas informés. Brian et Patrick Kennedy et les Haynes Hubbards prennent la parole. On serait surpris qu'ils l'aient fait contre la volonté des MC.
L'inévitable Jim Gamble, éternel frustré de l'observatoire de la pédophilie en ligne (CEOP), déclare que les gens ne vont pas tuer leur enfant à l'étranger, ils le font dans un lieu familier et plus privé. Par ailleurs it's theoretically impossible to consider woke and wandered and completely ignore the possibility of Kate's fabricating evidence of an abduction but that's exactly what JG has done.
Le pompon appartient peut-être au détective espagnol, Julián Peribáñez, manifestement ravi de dire pis que pendre de son patron Francisco Marco (Metodo 3) auquel Netflix accorde un temps d'antenne surprenant, s'agissant d'un individu qui admet librement 1) avoir violé la loi portugaise et 2) avoir intimidé et corrompu des témoins (il dit avoit offert un demi million de dollars à un certain SM pour parler). La sympathie affichée de ce "détective" pour les MC n'est toutefois pas allée jusqu'à les avertir qu'ils étaient escroqués par M3 !
Si la production a cherché l'équilibre, c'est entre les pour et les contre la thèse de l'enlèvement, autrement dit entre les croyants et les mécréants ou entre les crédules et les incrédules, tout le reste a été écarté, comme s'il n'existait pas.
Ah, petit détail horripilant : le documentaire répète le mensonge du dernier Panorama où Richard Bilton affirme que Martin S a changé d'avis à propos de la ressemblance de Smithman avec Gerald MC. La BBC, contactée par la journaliste irlandaise Gemma O'Doherty (entrée en contact avec les S qui ont démenti), avait promis de rectifier, mais n'en ont rien fait!
Chronique amusante de Pat Brown, qui n'a pas été conviée (déjà snobée par S&S). Voir ici des critiques qui sont parfois judicieuses mais tombent régulièrement à plat car elles sont absolument toutes biaisées par un pseudo fait, non avéré, l'enlèvement. Comme si la disparition de MMC ne pouvait s'expliquer autrement, un biais que sert admirablement l'absence de corps.
Netflix prétend avoir recueilli des témoignages jamais entendus de ceux qui sont au cœur de l'histoire, y compris des amis de la famille McCann, des enquêteurs travaillant sur l'affaire et de ceux qui sont devenus l'objet de spéculations et de rumeurs médiatiques.
Voir ici la liste des principaux interviewés.
16 – CMTV - Rua Segura - débat à propos du docu de Netflix.
18 – 4ème épisode, Eddie et Keela, de la série de podcasts audio "Maddie" de M. Saunokonoko. Voilà ce qu'y déclare Colin Sutton (dont il faut quand même louer l'ouverture d'esprit, même tardive) :
Je ne suis pas sûr que l'enquête portugaise ait été aussi mauvaise qu'on l'a peinte ... et je ne pense pas qu'elle ait été l'inepte et incomplète enquête que certains ont décrite. Ils ont entendu les témoins très rapidement, ils ont analysé les dépositions, ils ont enquêté, ils ont ré-interviewé, ils ont fait de la médecine légale du mieux qu'ils pouvaient. Parfois, les preuves sont absentes, vous ne pouvez tout simplement pas prouver ce que vous essayez de prouver.
Transcription et traduction ici.
Le miroir brisé ou la vérité méconnue - Aimé-Jules Dalou (1838-1902)
21 – La Grande-Bretagne possède l'un des environnements médiatiques les plus concentrés au monde. Trois entreprises dominent 83% de la diffusion des journaux nationaux ; cinq entreprises représentent 80% de la portée des journaux nationaux; cinq entreprises contrôlent 80% des titres de journaux locaux ; et deux sociétés possèdent près de la moitié de toutes les stations de radio analogiques commerciales. Le manifeste 2019 de la MRC (Media Reform Coalition) concerne 4 domaines (cadre nouveau pour la pluralité des médias, démocratisation de la BBC, réforme du système de réglementation indépendante de la presse et défi lancé à la domination des monopoles de plates-formes). 22 – Le spin doctor, qui ne l'est officiellement plus mais sévit néanmoins plus souvent qu'à son tour, semble pris de court en fait de spinning et répète le leit-motiv des MC "quand ils jugent utile, ils collaborent, sinon ils ignorent", car nul n'est à leur hauteur en fait de recherche. 24 – Le Daily Mail s'indigne que les MC soient pourchassés pour des frais de justice associés à l'action qu'ils ont menée contre GA ! Un nouveau coup/coût propre à les tourmenter... Sérieusement, alors que l'argent ne sort même pas de leur poche (mais de Madeleine's Fund) ! – Publication d'une vidéo YT (un dialogue) qui ne tire aucune conclusion
ferme ni ne défend une théorie, ce qui semble la seule conclusion raisonnable compte tenu de l'insuffisance des éléments probants. Les présentateurs déclarent qu'on leur a demandé, à partir du documentaire de Netflix sur l'affaire, de réfléchir à haute voix sur ce qui a pu se passer. Ils n'ont pas pu en décider mais ils disent clairement ne pas pouvoir écarter la possibilité d'une implication parentale. On voit ici des gens qui essaient de comprendre les attitudes et les comportements des parents et qui se trouvent dans l'impossibilité de le faire. Ils trouvent seulement le comportement des parents "bizarre", mais à la question de savoir si, par rapport aux preuves dont on dispose, ils peuvent élaborer un scénario, la réponse est "non". Celui qui a dit "non" donne néanmoins son avis ; il penche pour l'implication des MC, malgré l'insuffisance des preuves et le doute raisonnable qui empêchent de les traduire en justice. Il souligne également qu'il n'y a pas de preuves pour soutenir la théorie de l'enlèvement. L'un des hommes explique très bien pourquoi les gens se sentent mal à l'aise par rapport aux MC. C'est un bon exemple de la difficulté pour passer par-dessus les questions que suscitent les déclarations des parents. C'est l'intérêt principal de ce dialogue. Il y a eu un effort énorme pour faire avancer les choses, des tas de gens ont assuré qu'à leur avis les parents étaient innocents et que l'enfant avait été enlevée et on a mis sur pied OG pour enquêter sur un enlèvement. Cependant, personne n'a jamais apporté la moindre preuve d'enlèvement et/ou de l'impossibilité d'impliquer les parents. Tant que cela ne sera pas le cas, ces incertitudes subsisteront. 25 – Cinquième épisode, L'ADN, de la série de podcasts audio "Maddie" de Mark Saunokonoko podcastée par 9News. On y apprend qu'il existe des techniques d'analyse haut de gamme pour discriminer entre les profils ADN lorsqu'un prélèvement rassemble plusieurs profils, qu'un chercheur américain est prêt à ré-analyser pro bono, mais que SY, contacté, n'a pas réagi. Portugal Resident se demande si Operation Grange existe encore. Le prof. Mark Perlin propose de séparer, dans un prélèvement "mixte", l'ADN de chaque individu. Il pourrait alors démontrer que les 15 marqueurs (sur 19) qui "matchent" ceux de MMC sont les siens ou non et répondre à la question à laquelle John Lowe (FSS) n'a pas su répondre : l'ADN de MMC se trouve-t-il das ce prélèvement ? On voit pourtant une étroite collaboration entre FSS et Cybergenetics en juillet 2004. Transcription et traduction ici. S'il semble incertain que l'on puisse différencier avec certitude l'ADN d'un certain enfant lorsque ne peuvent être exclus du prélèvement ses parents et ses frère et soeur, l'attitude de SY n'en reste pas moins révélatrice : ils sont chargés de retrouver une petite fille et un ravisseur, rien d'autre. En tout cas, s'agissant d'expliquer ce que peut révéler l'ADN, il vaut certainement mieux s'adresser à un expert comme le prof. Mark Perlin qu'à des amateurs comme S&S et Jim Gamble (Netflix). Quelques informations (en français) ici.
28 – La journaliste Sandra Felgueiras, qui a plus que 15' de gloire comme star dans le documentaire de Netflix, illustre devant les caméras et sans état d'âme ce que doit être et ne pas être un journaliste qui se respecte. – Publication par la CEDH d'un opuscule intitulé Comprendre les statistiques de la Cour. 56.800 requêtes pendantes au 30.06.2019. En 2009, la Cour a adopté une nouvelle politique concernant l’ordre de traitement des affaires. Dans le cadre de cette politique, elle prend en compte l’importance et l’urgence des questions soulevées pour décider de l'ordre dans lequel les affaires doivent être traitées. Ainsi, les affaires les plus graves et celles qui révèlent l'existence de problèmes largement répandus sont distinguées (catégories I, II et III) et examinées dès que possible. La CEDH donne la priorité aux affaires relevant des articles 2 à 5, qui concernent les droits "cruciaux" : droit à la vie, droit de ne pas être torturé, de ne pas être réduit en esclavage et droit à la liberté. La requête des MC est décrite comme "en attente d'une première décision judiciaire", c'est dire qu'on l'a attribuée à une formation judiciaire mais que celle-ci n'a pas encore décidé si la requête serait écartée ou si le gouvernement concerné serait informé. |
Le 30 janvier 2017, le comité restreint de la Chambre des Communes pour la culture, les médias et le sport, en quête de moyens de réaction face au concept et au phénomène de l'information fausse (infox), lança une enquête et invita le public à faire connaître son point de vue avant le 3 mars.
Neuf jours auparavant (21 janvier), l'attaché de presse de la Maison Blanche, Sean Spicer, avait accusé les médias d'avoir délibérément sous-estimé l'importance de la foule lors de la cérémonie inaugurale de la présidence de Donald Trump. C'était faux, mais il n'avait fait que réitérer une pratique courante.
Kellyanne Conway, conseillère de DT, interrogée par Meet the Press, déclara que SS avait proféré non des faussetés, mais des "faits alternatifs", ce qui lui valut cette réplique : les faits alternatifs ne sont pas des faits, mais des contre-vérités.
KC voulait probablement dire que SS avait donné son interprétation des faits, mais avec "faits alternatifs" elle présupposait l'existence d'un monde parallèle dans lequel les puissants, s'excluant de notre monde commun, pourraient décider, avec certitude de l'impunité, que des allégations inexactes ou trompeuses sont des faits. Être cru ou non n’est pas le problème, la crédibilité n’est pas prise en compte, toute tentative de réfutation étant donc neutralisée.
S'il est socialement préoccupant de voir contre-vérités et opinions tenues pour des faits circuler indifféremment et induire une perception altérée de la réalité, l'indifférence à l'égard de la vérification des faits apparaît encore plus préoccupante.
En réalité, "faits alternatifs" revient à dire "taisez-vous!". La "post-vérité" est-elle liée à une montée de la "post-ignorance"?
Le 31 janvier 2017, la Cour suprême de justice portugaise (STJ) confirma la décision de la Cour d'appel dans l'affaire McCann c. Amaral et al. Selon l'avocat des appelants, Isabel Duarte, les McCann portaient depuis près de neuf ans les stigmates de l'innocence avec une double peine, la perte de leur enfant d'un côté, les persécutions d'un ancien inspecteur de police (G. Amaral) de l'autre. Dra Duarte avait formulé ses allégations à partir de la conclusion de l'ordonnance de classement de juillet 2008 mettant fin à l'enquête criminelle, faute d'obtention d'élément de preuve quant à quelque commission de crime par les suspects (les MC et une autre personne). Dra Duarte conféra indûment à cette ordonnance la valeur d'autorité de la chose jugée établissant l'innocence de ses clients.
Les juges de la STJ, qui n'étaient pas enclins à désigner les contre-vérités comme "faits alternatifs", rappelèrent que le dépôt du dossier avait été déterminé non pas parce que les procureurs avaient acquis la conviction que les appelants n'avaient commis aucun crime (article 277 du CPP), mais par l'impossibilité pour le ministère public d'obtenir des preuves suffisantes de la pratique de crime par les appelants (article 277-2). Les juges firent brièvement allusion à la principale raison de cette impossibilité, la question de l'innocence ou de la culpabilité des McCann concernant les faits ayant conduit à la disparition de leur fille étant hors sujet.
Selon les juges de la STJ, dont la décision fait référence notamment aux doutes des procureurs au sujet de l'histoire racontée par les McCann et des discrépances dans la ligne de temps, il n'était pas acceptable de considérer que l'ordonnance de classement, fondée sur l'insuffisance des preuves, dût être traitée comme une preuve d'innocence.
En répondant aux allégations des appelants, les juges de la STJ ouvrirent incontournablement une sorte de boîte de Pandore. Le doute envahit toute l'affaire McCann, un espace qu'occupait depuis 9 ans leur innocence grâce à une conférence de presse où leur chargé de communication, M. Mitchell, fit savoir que ses clients avaient été "blanchis". Un peu avant, ce 21 juillet 2008, le ministère public portugais avait annoncé dans un court communiqué l'ordonnance de classement de l'enquête sur la disparition de MMC, aucune preuve de crime n'ayant été trouvée, ce qui avait pour effet de lever tout statut d'arguido (suspect). Le même communiqué indiquait également que ceux qui en avaient la légitimité (les McCann, par exemple) pouvaient demander l'ouverture de la phase d'instruction ou la réouverture de l'enquête, des points auxquels M. Mitchell ne fit point allusion.
Que M. Mitchell ait induit le public en erreur volontairement ou non est hors sujet. Néanmoins, à la suite du communiqué de presse de M. Mitchell, tous les journaux nationaux et internationaux titrèrent faussement "Les McCann officiellement sanctionnés par la police", "Les McCann pourraient se plaindre du statut de suspect", "Les McCann menacent de poursuivre la police portugaise pour l'enquête ratée", "L'angoisse des McCann : la police devrait être sur le banc des accusés", etc.
Bien entendu, cet exemple d'information erronée ou erronée n'est qu'un exemple d'un phénomène multiforme, mais on observe que, bien que les réseaux sociaux aient critiqué la version de M. Mitchell quant à l'ordonnance du MP, les MSM ont fait la sourde oreille. Même après la publication de cette ordonnance et sa traduction ultérieure, les journaux n'ont aucunement vérifié les faits, peut-être parce qu'il leur tenait plus à coeur d'être politiquement corrects.
Le fait que la plus haute juridiction portugaise ait indirectement ruiné l'interprétation erronée de l'ordonnance de classement juste un jour après l'appel à communication sur les fake news de la Chambre des Communes était pure coïncidence, mais semblait exiger qu'il en fut tiré parti. En tant qu'étrangère, j'ai demandé si j'avais le droit d'envoyer une communication. Le greffier du comité a répondu que l'enquête était ouverte aux citoyens d'outre-mer. J'ai choisi de comprendre qu'il voulait dire "citoyens européens". Vérité des faits ou défaite de la vérité ? respecte les indications formelles de l'appel de la Commission.
Pendant ce temps, des militants contre le journalisme tabloïd ont exhorté les gens à inonder l’enquête de la Chambre des Communes de plaintes sur les inexactitudes des MSM (Main Stream Media). Bien que le cadre de référence n'indiquât pas que l'enquête ne couvrirait pas les fake news publiées par les journaux membres d'IPSO, le président du comité, le député Damian Collins, a déclaré que ces plaintes ne seraient pas prises en compte: il fallait les envoyer à IPSO, l'organe régulateur mis sur pied par l’industrie de la presse, le problème étant qu'en fait d'inexactitude, il n'était pas possible de se plaindre d'une fausseté publiée en ligne.
À propos d'IPSO, un flagrant cas d'inexactitude sur divers points (et non d'interprétation biaisée) s'est produit à l'automne dernier : les McCann luttent contre Gonçalo Amaral à la CEDH pour l'empêcher de s'enrichir (aux dépens de Madeleine's Fund). J'ai fait l'expérience d'envoyer une plainte (qui, ainsi que la demande de révision et l'échange de courriels, peut être lue ici) d'abord à The Sun puis à IPSO. IPSO n'a même pas mené d'enquête réglementaire, ce qui prouve, si cela était nécessaire, que cet organisme n'est pas un régulateur indépendant ou efficace pour la presse.
Pourquoi, au sujet de l'infox, les médias traditionnels ne présenteraient-ils pas aujourd'hui, comme ils le faisaient dans le passé, le même type de menace que les médias sociaux qui inquiètent tant les autorités? L'infox dans la presse écrite (voir la longue "rumeur jemmied window / shutter") a souvent une diffusion beaucoup plus large et donc pernicieuse que celle publiée sur d'obscurs sites Web.
Le 2 mars dernier, un article du Daily Mail se demandait, à propos du nouveau documentaire de Netflix consacré à Madeleine McCann, si Gonçalo Amaral, toujours mêlé à une longue bataille de diffamation avec les MC, y participerait. J'ai fait observer au Daily Mail que MC v Amaral et al., qui n'avait jamais été une action en diffamation, avait épuisé tous les recours, le Daily Mail a rétorqué que l'avocate portugaise de Kate et Gerry McCann, Isobel (sic) Duarte, avait interjeté appel auprès du CEDH contre le jugement portugais après que M. Amaral eut eu gain de cause en diffamation ... Le journal en déduisait que le différend était toujours en cours et durait depuis longtemps puisqu'il n'avait pas encore été réglé ..
Jusqu'à récemment, on pouvait croire que la rectification de l'histoire et de l'actualité était le sinistre apanage des régimes totalitaires. Nous ne vivons pas sous le règne de Big Brother et pourtant les faits sont précaires qu'ils mettent en danger nos démocraties. Comment les faire correctement fonctionner ? Faut-il craindre, comme Marcel Gauchet, une sorte d'anomie démocratique ?
Nous n'avons pas choisi l'époque où nous vivons, celle où nous allons mourir, mieux vaudrait essayer de la comprendre.
Ne reconnaît-on pas l'arbre à ses fruits ?
Je ne leur ai jamais rendu la vie infernale. J'ai juste dit la vérité et ils ont pensé que c'était infernal.