Citation

"Grâce à la liberté dans les communications, des groupes d’hommes de même nature pourront se réunir et fonder des communautés. Les nations seront dépassées" - Friedrich Nietzsche (Fragments posthumes XIII-883)

31.3.17

2017 MAR - Is the answer blowin' in the wind ?


chap. 53



John Cooke (1915) - Autour de l'homme de Piltdown : Barlow, Smith, Dawson, Woodward, Underwood, Keith, Pycraft, Lankester


Car n’est-il pas vrai que nous haïssons la vérité et ceux qui nous la disent, et que nous aimons qu’ils se trompent à notre avantage, et que nous voulons être estimés d’eux autres que nous ne sommes en effet ? - Pascal (Pensées)
En décembre 1912, l'avocat et géologue amateur Charles Dawson et le paléontologue Arthur Smith Woodward annoncèrent au monde entier qu'ils avaient découvert le chaînon manquant entre le singe et l'homme. L'homme-singe était doté d'un crâne humain et d'une mandibule simiesque dont les canines étaient usées comme chez l'homme.  
En novembre 1953, le département de géologie du Muséum d'histoire naturelle de Grande-Bretagne avoua discrètement que l'homme de Piltdown était un faux dont l'auteur demeurait incertain. Le crâne était moderne, et les dents fixées à la mandibule de singe avaient été limées. Si la supercherie ne tenait qu'à cela, comment tant de sommités scientifiques s'y laissèrent-elles prendre pendant plus de 40 ans ?
 

Stephen Jay Gould (The Panda's thumb) proposa plusieurs explications, notamment la propension à prendre ses désirs pour des réalités et les préjugés culturels, et un coupable, Teilhard de Chardin. Il aurait voulu faire une blague, non une fraude, mais l'affaire prit de telles proportions que la honte terrassa dans l'oeuf le courage de faire machine arrière.  

La grande leçon du hoax de Piltdown est d'avoir rappelé que les théories sont des grilles d'interprétation des faits. En élaborant des théories, on tente de donner un sens aux faits et c'est à travers eux que l'on met les théories à l'épreuve. Telle est la démarche scientifique. Aujourd'hui l'association d'un crâne humain et d'une mâchoire de singe semblerait rocambolesque, mais au début du vingtième siècle on croyait que le cerveau humain s'était développé avant les autres organes, leur montrant le chemin du progrès en quelque sorte. 
Les faits ont donc été modelés afin de confirmer ce préjugé culturel, ce qui, une fois encore, montre bien que les informations nous parviennent à travers les filtres de notre culture, de nos espoirs et de nos attentes (Gould 1982).
Une des conséquences de cette mystification qui jeta quand même un faux éclairage sur l'évolution humaine (les australopithèques se tenaient debout, mais leur cerveau était petit), a été l'apparition d'une pléthore de détectives amateurs, fermement décidés à découvrir le coupable de la mystification. Sir Arthur Conan Doyle, qui félicita Dawson, compta même au nombre des suspects, une sorte de comble pour le mentor de Sherlock Holmes.
Je me souviens du temps où vous cherchiez des réponses en faisant appel à votre astucieux pouvoir de déduction.




 

L'homme de Piltdown ne fut pas le seul hoax à avoir eu raison de la raison de ACD. Le magazine The Strand, où parurent la plupart des aventures de Sherlock Holmes, publia (Noël 1920) un article dans lequel ACD rapportait, après enquête, des faits sur des fées que deux jeunes filles de Cottingley (Yorkshire) avaient photographiées (ACD dominait l'art et la technique de la photographie). On ne sait si ce fut pour ménager celui qui désirait désespérément que les photos soient vraies ou se ménager elles-mêmes, les jeunes filles ne révélèrent le secret des découpes de papier que longtemps après la mort de ACD.
 

Pour en revenir à l'affaire MC et recourir, comme le procureur de la république José de Cunha Magalhães e Menezes, à un euphémisme, on peut dire que l'enquête criminelle sur la disparition de Madeleine MC a commencé par une non-vérité, s'est développée au gré de toutes sortes de non-vérités ou de pseudo-vérités, et malgré elles, pour s'achever en laissant la place à une fausseté qui occupa le devant de la scène médiatique depuis lors. Les médias britanniques, qui, à l'occasion de la publication du jugement du STJ, début février 2017, durent constater que leurs plumes respectives avaient produit une fausse nouvelle*, plutôt que faire amende honorable et méditer sur les causes et les conséquences de tant d'années d'obscurantisme, s'efforcèrent si parfaitement d'oublier cette vérité dérangeante que quarante-huit heures plus tard il n'en était plus question (Il est vrai qu'on les y aida de diverses façons) : la fausseté  sortit de la mésaventure plus solide et intégrée que jamais, comme allait en faire la preuve indirecte le commissionnaire-adjoint de Scotland Yard (avril 2017), lors d'une allocution sur les recherches, 10 ans après.

* Il s'agit d'une nouvelle qui est erronée, qu'on la fasse passer pour vraie en sachant qu'elle ne l'est pas ou qu'on la croie exacte sans se donner la peine de vérifier, ou encore qu'on la tienne de sources réputées fiables. Ce n'est donc pas une "fake news", une publication qui "imite" et se fait passer pour un authentique article de presse sans en être un.
 
L'idée de publier de fausses nouvelles vient de loin. Pierre l’Arétin,  un journaliste italien du 16e siècle, ouvrit la voie. Guy de Maupassant le décrit comme un admirable sceptique, un prodigieux contempteur de rois, le plus surprenant des aventuriers qui sut jouer, en maître artiste, de toutes les faiblesses, de tous les vices, de tous les ridicules de l’humanité, un parvenu de génie doué de toutes les qualités natives qui permettent à un être de faire son chemin par tous les moyens et d’être redouté, loué et respecté… 

Le Titien - Portrait de l'Arétin (vers 1512)

Il serait vain, un peu comme dans le hoax de Piltdown, de rechercher les coupables et il ne serait pas juste de parler de "mensonge", car après tout ceux qui lancèrent ce qui allait vite devenir une rumeur n'ont pas dit le faux alors qu'ils connaissaient le vrai et ne se sont pas concertés. Ils ont porté la parole de l'informateur à la lettre et les circonstances, les contingences ont fait que... Et puis il faut être au moins deux pour que le story telling existe : quelqu'un qui parle et quelqu'un qui écoute.

La première contrevérité, celle qui mit le feu aux poudres, celle par laquelle tout commença, n'était probablement destinée, et pour la décharge de ses auteurs, qu'aux oreilles des proches. Réveillés au milieu de la nuit par un appel téléphonique aussi inattendu qu'effrayant leur apprenant que le volet et la fenêtre de la chambre des enfants MC avaient été forcés et que le lit de Madeleine était vide, ils trompèrent chacun de leur côté l'insupportable frustration de ne pouvoir agir en alertant qui l'ambassade, qui une chaîne TV, qui une agence de presse, qui un notable. Tant et si bien qu'à l'aube la narration mensongère, visant probablement à esquiver le blâme, s'était répandue telle une rumeur dans les principaux médias, prompts à la relayer et à la diffuser en boucle sur les chaînes TV et les radios ou à l'étaler à la une de tous les journaux, presse à sensation et presse qui se respecte confondues. Certes une enfant avait disparu, mais aucune intrusion n'avait été constatée, le volet et la fenêtre étaient en parfait état et seuls les MC les avait vus ouverts (c'est du moins ce qu'ils disaient). Il était encore temps de démentir en emboîtant la plume du gérant de l'Ocean Club, John H qui faisait valoir l'absence de traces d'effraction. Mais nul ne le fit et on voit mal, d'une certaine façon, un démenti public qui aurait fait passer les MC pour des imposteurs. N'étaient-ils pas suffisamment dans la peine ? Et il n'était pas possible de mettre en avant une sorte de téléphone arabe et d'éventuelles erreurs d'articulation, de prononciation, de confusion sonore, puisque chacun des proches avait été informé personnellement et aucun ne savait que les autres l'avaient été aussi. Aussi les tentatives de John H ne firent-elles que renforcer la rumeur tant il était irrésistible de voir dans ses propos une tentative de limiter les dégâts menaçant Mark Warner Ltd.

Un an plus tard on trouvait encore dans certains tabloïds la fausse nouvelle du volet et de la fenêtre forcés. 



En France, l'article 27 de la loi de 1881 punit la publication, la diffusion ou la reproduction, par quelque moyen que ce soit, de nouvelles fausses, de pièces fabriquées, falsifiées ou mensongèrement attribuées à des tiers lorsque, faite de mauvaise foi, elle aura troublé la paix publique. Les faits relatés doivent avoir un lien avec un évènement ou un fait d'actualité, ils ne peuvent porter sur des informations déjà divulguées. Par ailleurs la fausse nouvelle est "mensongère, erronée ou inexacte dans la matérialité du fait et dans ses circonstances". Elle concerne donc les faits et eux seuls.


Dans le sillage de la fausse nouvelle de l'effraction par la fenêtre, surgit le dogme d'une surveillance des enfants toutes les demi-heures. Certes les parents laissaient seuls leurs enfants pendant qu'ils dînaient à une centaine de mètres, mais ils faisaient des rondes. Or, ce soir-là, les parents étaient sortis vers 20h30, le père avait fait la seule ronde de la soirée vers 21h05 et vers 22h la mère avait découvert le lit vide.
L'enlèvement, d'abord postulat, autrement dit proposition ni évidente ni démontrée, s'imposa rapidement dans les médias et l'opinion publique comme fait, non pas un "fait alternatif", un fait tout court, sonnant et trébuchant.

Toutes sortes de pseudo-vérités ou contre-vérités ou vérités contrefaites s'ensuivirent. 
 
L'ultime contrevérité, et non la moindre, consista à interpréter l'ordonnance de classement comme une absolution. Lorsque fut publiée cette ordonnance qui mettait fin à l'enquête criminelle et donc au statut de témoin assisté de trois suspects, le spin doctor des MC, qui n'était pas payé pour discerner entre ivraie et vérité, proclama, lors d'une conférence de presse convoquée pour disséminer la bonne nouvelle, que ses clients avaient été innocentés. C'est donc le mot "Cleared !" que les médias frénétiquement inscrivirent à la une. Personne ne voulut écouter ceux qui avaient lu l'ordonnance et pas simplement les dernières lignes.  Or celle-ci disait clairement que les MC avaient perdu l'occasion de montrer l'innocence qui tant leur tenait à cœur et qu'ils se plaisaient à rappeler à qui voulait les entendre, du simple fait que leurs compagnons de voyage avaient refusé de participer à la reconstitution que le ministère public avait requise afin de clarifier maints points obscurs et relancer l'enquête sur une base saine.
Stricto senso, les MC n'avaient pas refusé de participer à la reconstitution des événements de la soirée du 3 mai, puisque, comme arguidos, ils étaient tenus d'obtempérer. Imaginer que le groupe des 7 se soit dérobé aux sollicitations du Ministère public alors que les parents comptaient sur eux est tout simplement aberrant.

...nous pensons que c'est aux MC que le plus grand dommage a été infligé car ils ont perdu l'occasion de prouver ce qu'ils ne cessent d'affirmer depuis qu'ils ont le statut de témoin assisté : leur innocence par rapport à ce drame fatal.

S'ils avaient répondu aux demandes du procureur, s'ils avaient coopéré avec la PJ, ils auraient pu montrer, au lieu de se limiter à dire, qu'ils n'étaient pour rien dans la disparition de leur fille. Ils ne l'ont pas fait, il n'est donc pas interdit de s'en étonner et, faute de justification plausible des intéressés, de spéculer. Les procureurs, eux, étaient conscients des conséquences puisqu'ils ont qualifié l'abstention de dommage majeur Certes rien n'a été découvert qui ait pu être imputé aux MC, mais rien n'a été découvert non plus qui les ait mis positivement hors de cause.
Ni coupables, ni innocents, mais peut-être coupables ou peut-être innocents, autrement dit cruellement voués à être l'objet d'une insupportable mais légitime défiance.





Mars


02 – Envoi de Truth of Facts or Defeat of Truth ?  au Comité restreint pour la culture, les médias et les sports de la Chambre des Communes dans le cadre de l'appel à communication pour une enquête sur les fake news.


03 – Le jugement "droit à la liberté d'expression vs droit à l'honneur" fait désormais partie de la jurisprudence établie par le STJ. 
Résumé sous les mots-clefs suivants :
- droit au bon nom
- liberté d'expression
- liberté d'information
- moyen de communication sociale
- principe de proportionnalité
- résolution de conflits
- figure publique
- intérêt public
- principe de la présomption d'innocence
- devoir de réserve
I - La liberté d'expression et l'honneur sont deux droits fondamentaux qui, compte tenu de leur pertinence, méritent une consécration constitutionnelle. 
II - Ces droits appartiennent à la catégorie des droits, libertés et garanties personnelles, de sorte que son régime spécifique, prévu à l'article 18-2 de la CRP, leur est applicable.
III - Le paragraphe 2 exprime ainsi le principe de proportionnalité, également appelé interdiction du principe d'excès. 
IV - A la lumière de la Constitution, la liberté d'expression et l'honneur ont la même valeur juridique, rendant tout principe de hiérarchie abstraite irréalisable. 
V - Le principe d'accord ou d'harmonisation pratique doit donc être invoqué. 
VI - Cependant, étant donné qu'il est impossible de parvenir à une solution d'harmonisation, pour résoudre équitablement le conflit des droits, il faut pondérer les biens selon une méthodologie d'équilibrage adaptée à la spécificité du cas. 
VII - Raison pour laquelle la résolution du conflit devra prendre un caractère concret, s'épuisant dans chaque cas résolu. 
VIII - La résolution concrète du conflit entre la liberté d'expression et l'honneur des figures publiques, dans le contexte juridique européen où nous sommes insérés, se déroule sous l'influence du paradigme jurisprudentiel européen des droits de l'homme. 
IX - En interprétant et en appliquant la Convention européenne des droits de l'homme (ConvEDH), la Cour européenne des droits de l'homme (CourEDH) a défendu et développé une doctrine de protection accrue de la liberté d'expression, notamment lorsque la cible des faits imputés et de la formulation de jugements de valeur déshonorants est un personnage public et qu'il y a une question d'intérêt politique ou public en général. 
X - À la lumière d'une approche jurisprudentielle stabilisée par la CEDH, comme dans les cas analogues au présent, les tribunaux portugais ne peuvent qu'être influencés par le paradigme européen des droits de l'homme.
 XI - Une fois pondérés les intérêts en cause et suivie une méthodologie d'équilibrage adaptée à la nature spécifique de l'affaire, il faut en conclure que c'est la liberté d'expression qui, en l'espèce, demande une plus grande protection.

 
XII - L'exercice de la liberté d'expression en l'espèce se situe dans les limites tenues comme recevables dans une société démocratique d'aujourd'hui, ouverte et plurielle, en tenant compte des critères de pondération et du principe de proportionnalité susmentionnés, ce qui exclut que
l'honneur lésé invoqué par les appelants soit licite. 

XIII - Le principe de la présomption d'innocence et l'obligation de réserve ne sont pas pertinents pour la décision sur la question à résoudre.



Récapitulons car l'affaire MC v. GA et al est définitivement terminée, CEDH ou non. 

 
06 – Un jeune soldat de la RAF, Corrie MK, s'est volatilisé au milieu de la nuit dans le Cambridgeshire. Une recherche, qui devrait durer une dizaine de semaine, est entreprise dans la décharge de Milton : 8000 tonnes à fouiller (920 m2 et une hauteur de huit mètres). Aucune opération de ce type n'a été mise sur pied dans la recherche de MMC. Mais aussi le traitement des résidus urbains est différent en Algarve.


07 – Le public deviendrait plus circonspect quant à la manière dont fonctionnent les médias, selon James Rodgers (University of London), qui remarque que les “fake news” ne sont pas une nouveauté. Ce qui est inédit, c'est la propagation à grande échelle et la participation, en raison de l'accès de tous aux réseaux sociaux.

11 – The Mirror annonce que Madeleine's Fund a investi (où ?) environ 500 mille livres (c'était pratiquement le seul détail des comptes déposés en décembre 2016 pour l'exercice avril 2015-mars 2016), tandis que le Home Office vient de renouveler (un peu à la baisse, 85 mille livres pour 6 mois, donc jusqu'à septembre) le financement spécial des opérations. Naturellement, selon la "source proche", le filet se resserre sur... Mystère, mystère. Combien gagnent les officiers de police britanniques ici
 
 

12 – C'est la Journée Mondiale de la censure sur Internet. En 2006, Google s'était autocensuré, bloquant ce qui n'était pas politiquement correct, pour entrer sur le marché chinois. Les 15 pays ennemis d'Internet selon Reporters sans Frontières :

13 – Good Morning Britain (ITV) - Controverse sur la pertinence de continuer à financer la recherche de MMC, qui a déjà englouti plus de 11 millions de livres, alors que les fonds alloués à tant d'affaires de disparition d'enfant dépassent rarement 2500 livres. La dernière piste du Met serait un employé de l'OC qui n'aurait pas enlevé mais n'aurait pas dit ce qu'il savait. Source non identifiée. L'ex-top PO Sue Hill  le dit sans hésitation : Enough is enough. Mais il y a toujours quelqu'un pour faire les gros yeux et s'indigner (ici Piers Morgan) qu'on ne fasse pas du sort, non de MMC, mais des MC, le comble de l'horreur.


Le présentateur TV Matthew Wright tient à peu près le même discours (Channel 5).


14 – Recommandations de Impress, organisme indépendant de surveillance des médias, au gouvernement quant au phénomène "fake news" qui courent, qui courent, comme le furet. Selon Impress, ce n'est pas l'émergence de fake news qui a fait chuter la confiance vis-à-vis des médias, mais une baisse de confiance pré-existante qui a permis aux fake news de prospérer. Il en est résulté une instrumentalisation de l'expression fake news par des figures politiques contre les vraies nouvelles. 


Il est passé par ici, il repassera par là.


Le Media Policy Project de la London School of Economics and Political Science publie Fake News : Public Policy Responses par Damian Tambini.

15 – Au programme de Rua Segura (CMTV), un bref débat avec l'ex-OPJ Carlos Anjos et l'ex-ministre des affaires étrangères Rui Pereira sur le supposé "nouveau suspect" de OG. Traduction ici.

16 – Tandis que le populiste West Australian interroge Pat Brown (pas d'élément indiquant qu'elle est vivante et qu'elle a été enlevée), les tabloïds se déchaînent sur un suspect "d'en savoir trop" et quelques célébrités mineures, en quête de publicité ?, blâment les MC sur les réseaux sociaux pour leur négligence, du régurgité inlassablement depuis presque dix ans. L'effet le plus remarquable de cette fièvre réchauffée est l'assourdissant silence après la "révélation" de l'implication toujours en question. Transcription en portugais ici.



17 – Pat Brown explique à Jade Robran son raisonnement sur Radio 5 après avoir rendu publique sa conviction que MMC n'a jamais été enlevée et qu'elle est morte dans l'appartement de ses parents au Portugal.
"Je me penche sur cette affaire depuis presque aussi longtemps que l'affaire existe, c'est-à-dire depuis maintenant dix ans", je n'ai trouvé aucune preuve d'enlèvement, il n'y a certainement rien qui soutienne cette preuve physiquement, ou comportementalement ou circonstanciellement. Absolument rien."
"Mais il y a beaucoup de preuves dans une autre direction et c'est ce qui a vraiment été très éludé ces dernières années par la presse britannique et par la presse américaine également."

La théorie de PB est en grande partie conforme à celle avancée par GA sur l'enlèvement supposé de MMC (La vérité (sur le) mensonge). Le mois dernier, Amaral a gagné un long procès intenté par les MC au sujet de ce livre... "Les MC l'ont poursuivi en justice et ont fait retirer son livre du marché. L'affaire a traversé les tribunaux pendant de nombreuses années et est maintenant arrivée jusqu'à la Cour suprême du Portugal, qui lui a donné raison et a même précisé que les MC n'avaient jamais été blanchis. Lorsque je me suis penchée sur l'affaire et que j'ai analysé toutes les preuves... je suis arrivé à la même conclusion. Je soutiens ses conclusions."

PB a déclaré que "pas mal d'experts" étaient également d'accord : "Il n'y a pas qu'une seule personne à croire que les preuves montrent la possible implication des parents dans ce qui est arrivé à Madeleine. Il me semble que les preuves indiquent que quelque chose s'est produit, qu'il y a eu un accident alors que [les parents] n'étaient pas là, et donc que Madeleine est morte dans l'appartement."


18 – On dirait que l'autre côté de la planète part à point dans la course aux célébrations du 10è anniversaire... mais de quoi ? De la disparition, de la recherche, de la constance, de l’endurance ? John Campbell,  CheckPoint - radio nouveau-zélandaise, interroge Pat Brown sur les raisons qui lui font dire que MMC n'a pas été enlevée. PB explique qu'aucun élément probant n'indique qu'il y ait eu enlèvement, mais qu'il y a des indices de mort accidentelle dans l'appartement. JC fait valoir qu'il est délicat de mettre en cause des parents, déjà si cruellement touchés, PB rétorque qu'il faut séparer sentiments et faits, et JC lui donne raison. PB ironiquement mentionne qu'elle n'a jamais vu d'affaire dans laquelle l'enquête commence sur une supposition (en l’occurrence l'enlèvement, au mépris des conclusions de l'ordonnance de classement du MP). Les MC ont été exclus non pas après examen des faits, mais avant.



Le "côté de chez Amaral", le site PJGA (Projecto Justiça para Gonçalo Amaral, fondé par quelques supporters pour financer les recours de l'ex-commissaire), prudent ou jaloux de ses prérogatives, se décide enfin, au bout d'un mois et maintes implorations, à faire connaître la fameuse requête de nullité (arguição de nulidade) contre le jugement de la Cour suprême, finalement signée non par Dra Duarte, mais par un fusible, son assistant (no comment). Le béotien y distingue une vision du droit manipulatrice étonnante puisque la requête s'adresse à la magistrature suprême.


– Blacksmith Bureau - Payback time

21 – La réponse du STJ a été beaucoup plus rapide que prévu, la faiblesse de l'argumentation des MC semblant expliquer cela : l'assemblée plénière des juges, rejette l'objection des appelants. Texte original et traduction ici.



Quel était l'argumentaire de la "réclamation" (arguição) ?
- Les appelants considéraient, rien de moins, que la conclusion du jugement du STJ n'était pas fondée.
- selon cette conclusion, la présomption d'innocence (qui ne vaut que lorsqu'une accusation est formulée) ne pouvait restreindre la liberté d'expression.
- L'hypothèse de départ (du STJ) était erronée. 
- Selon cette hypothèse, le ministère public avait mis fin à l'enquête criminelle faute d'avoir obtenu suffisamment d'éléments indiquant la commission de crime par les appelants.  
- Les conclusions contredisaient les fondements factuels.
- Cette contradiction et le manque de fondement devaient être rectifiés.


Qu'observent les juges qui, cette fois-ci devraient moins mâcher leurs mots puisque, finalement, c'est à eux que s'en sont pris les MC ? 
- Un jugement n'est valide que s'il  spécifie sur quels fondements factuels et légaux s'appuie la décision.
- C'est le cas du jugement, qui a spécifié les fondements.
- Essentiellement les appelants contestent la décision, considérant  certainement que les raisons qui la motivent sont fausses.
- Ce point toutefois ne produit pas d'annulation, mais peut éventuellement affecter la valeur doctrinale du jugement.
- Par ailleurs le jugement n'est pas valide lorsque les fondements sont en opposition avec la décision.
- Il s'agit d'un défaut logique compromettant le jugement, puisque ses fondements ne mènent pas à la décision exprimée, mais à un résultat opposé.
- Les appelants évoquent des vices de contradiction entre les fondements factuels et les conclusions.
- Cependant, on ne voit aucune contradiction entre les fondements et la décision.
- Les appelants ne pointent avec rigueur aucune contradiction, ils y font allusion là où le jugement aborde la relation entre leurs droits à l'honneur et à la réputation et la présomption d'innocence.

Que dit le jugement là-dessus ?
- Le suspect doit bénéficier de la présomption d'innocence tout au long du procès judiciaire criminel.
- Ce principe ne peut être brandi comme restriction à la discussion publique de faits potentiellement criminels, bien que les entités publiques doivent faire preuve de réserve dans leurs communications afin d'éviter de créer la conviction que le suspect est en fait coupable.
- La CEDH a décidé que le principe de la présomption d'innocence ne s'appliquait pas aux procédures civiles (surtout compensatoires) postérieures au procès criminel afin de préserver le droit de la victime à être dédommagée par une cour de justice.

-La recherche de la vérité, y compris de la vérité sur la justice, a toujours été une les principales justifications de la liberté d'expression.
- Ce qui est en jeu dans l'affaire présente n'est pas la responsabilité pénale des appelants, autrement dit la question de leur innocence ou de leur culpabilité vis-à-vis des faits ayant entraîné la disparition de leur fille n'est pas du ressort de la Haute Cour. En revanche il lui appartient de réfuter l'argument de mise hors de cause des MC par l'ordonnance de classement.
- Ce qui ici est en jeu est simplement la responsabilité civile des intimés dans la mesure où ils ont exprimé et fait savoir leur thèse/opinion sur la disparition en question.
- Il suit de là que l'issue de l'action présente n'est pas à même de mettre en cause la dimension extra-processive de la présomption d'innocence.
- Les magistrats de la Haute Cour ont examiné l'ordonnance de classement de juillet 2008 uniquement parce que l'avocate Isabel Duarte avait affirmé qu'elle mettait les MC hors de cause. Les magistrats ont remarqué que la conclusion n'était pas incompatible avec le contenu de l'ordonnance (l'affirmation qu'il y avait suffisamment de soupçons fondés pour constituer les MC comme arguidos, le fait aussi que les faits rendaient fort sujette à caution la narration "enlèvement") ou avec la réouverture de l'enquête en cas d'élément nouveau (l'ordonnance indique clairement que la décision de classement est passible de modification de diverses manières).
b) L'affaire concernant les témoins assistés Gerald et Kate MC est classée parce que rien n'indique qu'ils aient commis quelque crime à l'abri des dispositions de l'article 277-1 du CPP.
Dans le développement de l'ordonnance est attestée la présence de soupçons étayés suffisants pour constituer les MC arguidos. L'ordonnance émet par ailleurs de fortes réserves quant à la théorie de l'enlèvement.
Ce n'est pas à l'alinéa 1, mais au 2, que le procureur se référait, puisque le 1 ne permettrait pas la réouverture de l'enquête, hypothèse clairement évoquée.
- Ainsi, outre le recours à la voie juridictionnelle par l'ouverture d'une instruction et la requête auprès d'un supérieur hiérarchique, l'enquête peut être rouverte si de nouveaux éléments surgissent, invalidant les attendus de l'ordonnance de classement.
- L'ordonnance de classement n'étant donc pas une décision de justice stricto senso et ne présentant pas de forme définitive, invoquer le principe de la présomption d'innocence ne saurait être justifié pour restreindre la liberté d'expression.


- L'invocation, par les appelants, du non-respect de la présomption d'innocence n'est pas pertinente, étant un droit du suspect au long de la procédure criminelle, alors que ce qui est en cause dans cette action est la responsabilité civile des intimés.
- Il n'y a donc pas collusion entre les fondements et la conclusion. 
- Désapprouver les fondements n'est pas la même chose que considérer qu'il y a erreur de jugement.
Sous les mots-clefs suivants : 
- nullité du jugement
- opposition entre les fondements et la décision
- liberté d'expression
- principe de la présomption d'innocence
- ordonnance de classement de l'enquête criminelle
Voici le résumé du jugement :
Le jugement, proféré après recours de révision, n'est pas nul en raison d'une opposition entre les fondements et la décision, art. 615-1, al. c) du CPC, s'il décide d'absoudre les accusés de la demande de condamnation fondée sur la responsabilité civile, au motif, entre autres, qu'il n'était pas pertinent d'invoquer la violation du principe de la présomption d'innocence des appelants puisque l'ordonnance de classement de l'enquête criminelle contre eux s'appuyait sur l'absence d'indices de pratique de crime et non sur la démonstration de leur innocence.
Rappelons que le président du STJ est, hiérarchiquement, la 4ème autorité de l'État portugais, la 3è étant le président du Conseil constitutionnel.

Charles Dickens


31 – C'est le jour de clôture de l'année fiscale. Remarquer que Madeleine's Fund a dépensé des fonds en raison de l'assignation lancée par les MC, eu égard aux dommages causés à la recherche de MMC. Mais cette allégation a été jugée "fait non prouvé" par le tribunal de première instance. À partir de là les dépenses doivent donc avoir une justification différente. La clause 5 du Memorandum of Association dit que les bénéfices privés sont limités. 5.2 dit qu'aucune part du revenu et du patrimoine du fonds ne doit être utilisée pour le bénéfice de ses membres. Or à présent MF n'a en tout et pour tout que 5 membres (dont Gerald et Kate MC).


On apprendra à travers une requête à l'abri de la FOI que 3 policiers britannique se sont rendus au Portugal en mars et 2 l'ont fait en mai. Où au Portugal ? Trois ensemble ? Il est possible que la première visite soit liée à la décision du STJ car, une fois réfutée l'affirmation que les MC avaient été mis hors de cause par l'ordonnance de classement, la situation contemplée par OG se trouve complètement modifiée. Que le Yard ait fermé les yeux ou qu'il ait été mal informé, AC Rowley devait tenter de justicier la position de OG et avait besoin du soutien de Pedro do Carmo.