Citation

"Grâce à la liberté dans les communications, des groupes d’hommes de même nature pourront se réunir et fonder des communautés. Les nations seront dépassées" - Friedrich Nietzsche (Fragments posthumes XIII-883)

Des chiens et des odeurs

La société applaudit le déploiement de chiens spécialisés en cas d'ensevelissement ou de détection d'explosifs, de drogues etc., car les capacités du chien sont considérées comme supérieures à celles de l'homme.



Forensic Evidence Canines - Status, training and utilisation

Comme les odeurs envoûtantes, les pestilences pénètrent dans notre système olfactif sous forme de molécules volatiles. Invisibles et invasives, dotées néanmoins d'une présence incontournable, les molécules malodorantes s'insinuent sans que nous puissions nous en défendre ou nous en débarrasser. La seule parade est piètre : se boucher le nez et prendre la poudre d'escampette. La volatilité des molécules odorantes explique que des odeurs puissent persister alors que leur source n'est plus là : ce sont les odeurs résiduelles. C'est un peu comme la lumière provenant d'une étoile qui n'est déjà plus, mais que cette lumière nous fait voir. Qu'un chien puisse reconnaître l'odeur d'un cadavre absent, qui n'a peut-être été posé que quelques minutes là son odeur est encore présente, est un défi à l'intelligence des humains et explique que nous soyons comme Thomas : il nous faut voir pour croire.

La muqueuse olfactive du chien contient jusqu'à 200 millions de cellules, 50 fois plus que celle de l'homme. Comme il a beaucoup moins de papilles gustatives, flairer sa nourriture est pour lui vital. Il utilise près d'un tiers de son cerveau à analyser, interpréter et mémoriser des informations olfactives. La principale caractéristique du chien, dont l'olfaction est le plus accompli des sens, est sa capacité à discriminer entre des odeurs proches. Le mécanisme neuronal qui sous-tend cette compétence discriminatoire n'est pas clair, mais pourrait être lié au grand nombre de récepteurs. Que sent l'animal qui lui permet de différencier, par exemple, des restes humains de restes animaux ?

Les chiens de détection, qui relèvent de la phase préscientifique d'une enquête criminelle, sont dressés pour signaler la présence d'une certaine substance dont le chien apprend à reconnaître l'odeur spécifique – les vrais chiens "forensiques", comme l'EVRD et le chien CSI, sont entraînés à ne reconnaître qu'une seule odeur. Pour obtenir une récompense, le chien doit alerter son maître. C'est Pavlov.

Le temps et le lavage atténuent l'odeur sans la supprimer.
On ne sait pas pendant combien de temps après la mort ces chiens peuvent détecter un corps, ni pendant combien de temps un cadavre récent doit avoir reposé quelque part pour qu'un chien en détecte la présence, ni l'ancienneté minimum du post-mortem (établi à 90 minutes, dans certaines conditions) pour qu'un chien reconnaisse l'odeur de cadavre.
Dans les pays qui l'autorisent, le comportement d'un chien de détection par rapport à une odeur particulière peut être cité en témoignage s'il vient à l'appui d'une cause probable établie par ailleurs. Le maître-chien est essentiellement autorisé à présenter son avis d'expert sur ce qu'indique le comportement du chien. La plupart du temps, toutefois, le comportement du chien est considéré comme une présomption circonstancielle.
L'arbitre des faits (trier of fact, charge qui semble ne pas exister dans le droit français ???) peut confondre le témoignage du maître-chien sur son chien avec l'hypothèse que le comportement du chien est une preuve directe plutôt qu'une inférence.


Forensic Search Dog 

C'est un chien spécifiquement dressé pour indiquer la présence (ou l'odeur résiduelle) d'un cadavre ou de tissus humains en décomposition. Ces animaux sont aussi dressés à exclure l'odeur d'urine humaine, de fèces et de semen. Ils n'alertent pas à l'odeur résiduelle d'un être vivant.
Un chien pisteur suit l'odeur résiduelle laissée par quelqu'un qui n'a fait que passer. Tant que cette odeur n'est pas dénaturée au point de ne plus pouvoir être différenciée – Le temps et les conditions environnementales sont des facteurs importants –, le chien suit la trace d'une source absente.
En matière de détection de cadavre, la compétence du chien n'est défiée que si l'odeur est résiduelle, autrement dit si aucun tissu humain n'est découvert à l'endroit marqué par le chien.
L'exactitude et la précision sont cruciales.
On parle d'exactitude quand un chien entraîné à détecter une odeur précise réagit seulement s'il a repéré cette odeur et non une odeur proche.
On parle de précision lorsque le chien réagit d'une certaine manière, toujours la même, à une odeur donnée. S'il y a imprécision, en ce qui concerne l'odeur de restes humains, c'est que le chien ne différencie pas un cadavre humain d'un autre.
En principe un chien entraîné réagit à une odeur résiduelle de tissus humains en décomposition présente pendant plusieurs mois dans un local fermé.
À quoi réagit le chien ? Le maître-chien observe-t-il simplement ou est-il une sorte de porte-parole du chien ?
La littérature scientifique sur la compétence des chiens à détecter l'odeur de restes humains en décomposition n'est guère abondante et il n'y a guère de recherche sur la réaction aux odeurs résiduelles. Mais il y a nombre de travaux sur les diverses méthodes d'entraînement des chiens de détection. C'est de là que provient un problème majeur : la plupart des maîtres-chiens n'ont ni formation en police scientifique ni expérience légale. L'entraînement de search dogs forensiques est beaucoup plus rigoureuse et spécifique que celui des chiens de sauvetage, d'attaque ou des pisteurs.



Expérience identification d'odeur post-mortem

Le but de cette expérience est de déterminer si les chiens peuvent différencier l'odeur d'un être vivant de l'odeur de cadavre lorsque ces deux odeurs sont présentes côte à côte.
Des tampons de gaze stérile sont placés pendant très exactement 20 minutes sur la peau (intacte) de l'abdomen 1) de cadavres (post-mortem de 1 à 72 heures) et 2) d'individus en vie.
Les tampons sont ensuite conservés du plastique scellé jusqu'au moment de l'expérience Ces opérations sont accomplies avec des mains gantées de latex.
Sont exposés en ligne trois tampons de gaze, l'un imprégné d'odeur post-mortem, l'autre d'odeur d'être humain vivant et le troisième sans odeur.
Toutes les expériences sont faites sur une surface dure (asphalte, ciment, etc.). Le maître envoie le chien cadavre qui doit choisir (un seul choix par expérience). Les expériences sont "aveugles" pour les maîtres-chiens (ils ne savent pas si ni où se trouve une odeur de cadavre). Les choix sont qualifiés de correct ou d'incorrect seulement. Tout chien semblant attiré par deux tampons est éliminé de l'expérience et son choix est qualifié d'incorrect.
Les tampons ne servent qu'une fois.
Entre janvier et juillet 1997, 52 expériences ont eu lieu, avec cinq chiens. L'ancienneté des odeurs post-mortem utilisées était de 70 minutes à 3 jours.
Bien qu'une odeur post-mortem d'une ancienneté de 85 minutes ait reçu une réponse correcte, l'ancienneté permettant une réponse correcte de tous les chiens se situe entre 150 et 180 minutes.
Toutefois les chercheurs indiquent des faiblesses : pas de contrôle rigoureux des conditions de collecte des échantillons, sur les manière et cause de la mort, sur l'"âge" post-mortem des échantillons.

L'analyse des expériences permet d'énoncer les conclusions suivantes :

1) Il y a un risque non négligeable que le maître-chien donne involontairement un témoignage biaisé ou impropre quant à la présence ou l'absence d'odeur résiduelle provenant de tissu humain décomposé.
2) Les chiens spécifiquement entraînés à détecter l'odeur de restes humains décomposés peuvent être inestimables pour résoudre des questions d'obtention de preuve ou de détermination de l'orientation d'une enquête. Il est crucial, cependant, que les chiens soient utilisés dans des situations adéquates à leur entraînement et que le maître-chien soit capable de témoigner du comportement de son chien en se fondant sur des notes d'entraînement précises. Aucun chien utilisé à des fins forensiques pour la détection d'odeur de tissu humain décomposé ne devrait être entraîné à reconnaître une autre odeur si ses réactions et l'opinion du maître-chien doivent être utilisées dans une affaire criminelle.
3) Les techniques d'entraînement et de mise à l'épreuve existant dans la communauté des maîtres-chiens ne répondent pas aux besoins des chiens appelés à détecter de manière fiable des odeurs résiduelles, en fait d'entraînement spécifique et rigoureux.
4) Une recherche devrait être menée pour identifier plus précisément ce qu'on attend d'un chien en fait de preuve forensique. Des protocoles d'entraînement adéquats doivent être développés pour diminuer la marge d'erreur dans les conclusions.
5) Un chien très fatigué peut par inadvertance se sentir pressé de donner une fausse alerte parce qu'il en a marre et veut se reposer. Il est donc important de maintenir le chien à un haut niveau de forme physique afin qu'il puisse "travailler" plusieurs heures d'affilée avec seulement quelques courtes pauses.
6) Les chiens entraînés à détecter des odeurs résiduelles doivent être négativement conditionnés à l'urine humaine, aux déjections et au semen, afin de s'assurer que l'animal n'alertera pas quand il rencontrera ces substances. Tous les chiens, quel que soit leur niveau d'entraînement, utilisés dans la détection de reste humain en décomposition devraient être négativement conditionnés aux odeurs de restes non humains en décomposition. Il faut savoir, toutefois, que beaucoup de chiens réagiront ou montreront un intérêt face à tout tissu en décomposition à certains courts moments du processus de décomposition.
7) Une chose est d'envoyer un chien cadavre chercher des restes humains en décomposition, une autre est de le faire chercher des odeurs résiduelles et se fonder sur elles seulement pour asseoir une hypothèse.


Quels sont les facteurs susceptibles d'affecter la longévité d'une odeur ? La chaleur/le soleil, le vent, l'humidité et la pluie.


Expérience de durée de détectabilité d'une odeur résiduelle

Il s'agissait de déterminer pendant combien de temps une odeur restait détectable dans un lieu fermé après enlèvement de la source. Les items odorants – sang et des fluides corporels absorbés par du tissu et des cheveux – sont placés dans différentes pièces sur le sol, en l'air, pendant 5 heures, puis enlevés. La source de l'odeur n'est donc plus là, il ne reste qu'une odeur résiduelle, que l'homme ne perçoit pas ?
Les chiens, à des niveaux différents d'entraînement, sont venus sur les lieux jusqu'à 14 mois après l'enlèvement des items, ont pu détecter la plupart des endroits où s'étaient trouvés des résidus en décomposition.
Une odeur résiduelle reste un an dans un local soumis à peu d'influence environnementale ou de mouvements humains. Même après l'enlèvement des objets où était la source de l'odeur, les chiens ont pu localiser l'odeur résiduelle.


On peut se demander quel effet a sur le chien la connaissance qu'a le maître-chien. Le chien peut-il lire le langage corporel ?