Le développement des sites communautaires, des réseaux sociaux, des forums de discussion ou encore des blogs a de manière incontestable entraîné une nette augmentation des contentieux relatifs à Internet. L’internaute n’hésite pas à s’exprimer en ligne, au risque de commettre des infractions. Si la liberté d’expression est applicable aux publications en ligne, il n’en demeure pas moins que tout propos n’est pas bon à tenir sur la toile.
Il ne s’agit pas de considérer que le Web est une zone de non-droit, et le législateur, tout comme le juge, est là pour réglementer les actes des internautes et rechercher les responsables en cas d’infractions commises en ligne.
Le préjudice subi par une personne, physique ou morale, lié à la publication en ligne de propos lui portant atteinte – que ce soit une atteinte faite à son image, à sa vie privée, à sa personne ou à sa réputation – se doit d’être réparé, comme tout autre préjudice.
Il s'agit de dresser un état de ces contentieux affectant Internet et la réputation de l’internaute de manière générale, puis de comprendre qui est responsable et comment réagir lorsque l’on constate la diffusion en ligne de propos illicites.
a) Les limites aux avis sur Internet
Le développement des sites communautaires, des blogs, des forums de discussion et autres réseaux sociaux a décuplé les canaux d’expression des internautes, qui n’hésitent pas à donner leurs avis sur la société dans laquelle ils travaillent, à noter leurs professeurs, ou encore à critiquer une marque.
Les juges sont donc amenés régulièrement à se prononcer sur des propos négatifs tenus à l’encontre de sociétés, de marques, de produits sur différents sites Internet.
Le tribunal de grande instance de Paris a eu à trancher de la légalité du site Internet www.lesarnaques.com. Forum de discussion sur lequel les internautes sont libres de donner leurs avis, il n’est pas étonnant qu’une société – en l’occurrence, la société LILADS qui a pour activité la diffusion d’annonces immobilières sur différents sites Internet – ait réagi afin de demander au juge de condamner ce site en lui reprochant de commettre des actes de dénigrement à son encontre.
Mais le juge a tranché dans le sens du site lesarnaques.com et a considéré que ce site se situait dans un débat d’intérêt général et que l’association entre les contributions des internautes (même quand elles visent nommément un professionnel et indépendamment de leur contenu) et le nom délibérément provocateur du site ne constitue pas en soi un acte de dénigrement au seul prétexte de ce rapprochement entre le nom du site et celui de l’entreprise visée. Cela amène à s'interroger sur la frontière entre la liberté d’expression inhérente à toute critique et les propos pouvant faire l’objet d’une condamnation juridique.
Il est nécessaire de mettre en place des outils de veille.
Lorsque l’on tient des propos négatifs à propos d’une marque, d’une société ou de ses produits, il convient de parler de « dénigrement », qui peut effectivement causer un réel préjudice, dans la mesure où cette critique est à même d’influencer le potentiel consommateur.
Deux principes s’opposent : la liberté d’expression des internautes, d’une part, et le droit exclusif pour le titulaire d’une marque de l’exploiter, d’autre part.
Les juges ont admis la possibilité de dénigrer une marque si la critique est justifiée par un intérêt légitime tel que la santé publique, comme cela a été le cas d’une campagne de prévention reproduisant la marque de cigarettes Camel associée à des éléments morbides. De même, s’il s’agit d’une parodie humoristique de la marque, ou d’un usage polémique étranger à la vie des affaires, alors la liberté d’expression l’emporte.
En revanche, s’il s’agit d’un dénigrement impliquant une démarche dont le but est de discréditer, de décrier ou de rabaisser une marque et ses produits, alors la responsabilité délictuelle de l’auteur des propos sera engagée.
L’équilibre entre liberté d’expression et dénigrement de marque est fragile.
Dans un premier temps, il est souvent judicieux de faire constater les propos par huissier de justice, afin de se constituer la preuve de la diffusion des propos et leurs auteurs.
Ensuite, si l’objet de la demande est la suppression des propos en ligne, il convient de notifier le contenu illicite à l’hébergeur du site, qui devra suspendre, au titre de la loi pour la confiance dans l’économie numérique, tout contenu manifestement illicite. Il est nécessaire d’être vigilant car la notification doit répondre à certaines obligations légales.
Parfois, il sera nécessaire de demander la levée d’anonymat des contributeurs, ce qui peut révéler quelques surprises, comme le nom d’un concurrent.
Enfin, la saisine du juge civil sera opportune quand l’objectif est d’engager la responsabilité civile de l’auteur des propos et de réclamer des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.