Position du juge d'instruction Pedro Frias quant aux exigences des autorités judiciaires britanniques -
28.07.2008
28.07.2008
Le juge d'instruction Pedro Frias donne à connaître sa position au procureur de la république Magalhães e Menezes, ce dernier lui ayant soumis à la fois la lettre des avocats des autorités britanniques (adressée et au procureur et au juge) et sa propre position sur les trois premiers points de la lettre. On comprend que cette position était antérieure à la réception de la lettre des avocats portugais en représentation des diverses entités judiciaires et policières britanniques. De fait, le président de l'ACPO, Ken Jones, s'était déplacé à Portimao pour rencontrer le procureur Melchior Gomes à propos précisément de cette question. Voir ici.
On appréciera la tranchante phrase finale du juge évoquant au passage la missive laborieuse et lourde de références légales des avocats portugais. La brièveté ici en dit plus long que toute parole.
Après
consultation des procès-verbaux, je confirme qu'il s'agit de
références, informations et éléments qui, de fait, sont liés
directement à la réserve et l'intimité de la vie privée de
personnes à propos desquelles il n'existe aucune espèce d'indice
ténu d'implication dans les présents procès-verbaux, comme le
remarque le procureur de la république.
L'article
26-1 de la Constitution de la République portugaise consacre, sous
l'épigraphe "Autres droits de la personne", un ensemble de
neuf droits distincts pré-ordonnés à la protection de la sphère
nucléaire des personnes et de leur vie. Parmi ces droits figurent le
droit au bon nom et à la réputation, le droit à l'image et le
droit à la réserve de la vie privée et familiale.
Le
premier, brevitatis causae, est le droit pour tout individu de n'être
ni offensé ni lésé dans son honneur, sa dignité ou la
considération sociale dont il jouit à travers une imputation faite
par autrui et également de pouvoir réagir à une quelconque de ces
attaques.
Le second,
brevitatis causae, englobe, positivement, le droit pour tout individu
de définir les conditions dans lesquelles il autorise son exposition
ou plutôt sa propre auto-exposition et, négativement, le droit de
n'être pas photographié, sketché publiquement sans qu'il y ait
consenti ou encore sketché ou exposé graphiquement de manière déformée.
Le
troisième, brevitatis causae, comprend à la fois le droit
pour chacun d'empêcher l'accès de tiers à des informations sur sa vie privée
et familiale et d'empêcher la divulgation par un tiers d'informations que ce dernier possèderait sur la vie privée et familiale d'autrui.
Ces autres
droits de la personne, qui selon l'ordre des
droits fondamentaux dans la Constitution de la République portugaise
suivent immédiatement le droit à la vie et à l'intégrité
personnelle, articles 24 et 25, constituent également la limite
d'autres droits fondamentaux (limite immédiate à l'exercice) qui
pourraient entrer en conflit avec eux, principalement la limite à la
liberté de l'information et de la presse.
De la
sorte, considérant la teneur des références, informations et
éléments évoqués dans l'alinea A) du document du ministère
public et pondérant le potentiel de dommage qui découlerait de la
prise de connaissance de ces éléments par un tiers, dommage qui se répercuterait sur les droits fondamentaux référés, avec assise
constitutionnelle, d'un côté, sur l'intérêt aussi bien des
arguidos, principalement de la défense, que de la communauté par voie de
droit à l'information, j'entends que devront prévaloir les droits
fondamentaux au bon nom et à la réputation, à l'image et,
principalement, le droit à la réserve en matière de vie privée et
familiale.
Après
consultation des procès-verbaux, je constate qu'il s'agit à présent des
informations fournies par les autorités britanniques à travers un
mécanisme de recueil d'information dénommé Crimestoppers.
L'analyse
des informations ici en cause, bien que la source ne soit pas
toujours indiquée, fait très souvent référence à un courriel, ce
qui, une fois de plus, pourrait conduire à la révélation de l'identité de
l'informateur et à la perturbation de sa vie privée. Le système
Crimestoppers repose sur une relation d'anonymat et de confiance
entre le prestateur d'information et l'autorité policière qui la
reçoit, les uns et les autres britanniques, il repose sur le fait
que le prestateur de l'information sait ce qu'il fait et à qui il
adresse l'information, le risque d'aliénation de cette relation dans
notre pays et à travers l'examen du procès violerait le principe
de la confiance au fondement de la prestation d'information de la
part de la source, ce qui est également un élément à pondérer.
De sorte
que pondérant semblablement les valeurs fondamentales, j'entends,
ici aussi, que devra prévaloir le droit à l'intimité et à la
réserve de la vie privée.
Après
consultation des procès-verbaux, je confirme qu'il s'agit d'éléments
auxquels nous faisons allusion dans notre arrêté folios 4655-57,
et aussi d'informations qui sont liées au droit à la réserve de
la vie privée et familiale des personnes en cause.
Ainsi,
pondérant là encore les valeurs fondamentales, j'entends également
que devra prévaloir le droit à l'intimité et à la réserve de la
vie privée sur les autres droits.
Synthèse
Étant
donné ce qui vient d'être dit et moyennant les fondements référés,
je décide que les pièces spécifiées dans les alineas A), B) et C)
de la demande du ministère public présentée aux folios 4671 sq
doivent continuer à être soumises au secret de justice selon les
termes de l'article 86-7 du CPP, conjugués avec les normes
constitutionnelles évoquées.
Dans cette
conformité je donne mon accord sur le mode de procédure proposé par
le ministère public, autrement dit sur l'extraction et la
constitution d'une annexe se référant aux pièces faisant
partie des alinéas A) et B) et la désannexion des
pièces faisant partie de l'alinea C).
Les
annexes créées en raison de l'approbation de la proposition du ministère
public resteront sous la garde du procureur de la république
titulaire du processus en instance.
Requête
des folios 4675 sq envoyée au nom des autorités de la police
britannique.
En premier
lieu, le ministère public a déjà pris position sur les données devant continuer à faire l'objet du secret de justice et
c'est sur cette revendication que porte mon arrêté d'approbation.
En second
lieu, les requérants n'ont pas de légimité pour intervenir dans ce
processus comme s'ils se substituaient à son titulaire, le ministère
public.
Ainsi rien
n'est ordonné et la requête est rejetée.