Citation

"Grâce à la liberté dans les communications, des groupes d’hommes de même nature pourront se réunir et fonder des communautés. Les nations seront dépassées" - Friedrich Nietzsche (Fragments posthumes XIII-883)

20 - JUL - Interv. Füscher/Avocat CB

 

 C'est ridicule

Monsieur Fülscher, avec l'avocat hambourgeois Johann Schwenn, vous défendez Christian B., qui est soupçonné d'avoir enlevé et assassiné en 2007 la petite Madeleine McCann, alors âgée de trois ans. Avez-vous déjà eu accès au dossier dans cette affaire ?
-- Non, l'accès au dossier est refusé depuis un mois, ce qui ne permet pas à notre collègue Johann Schwenn et à moi-même en tant que défenseurs de contrer l'allégation. Notre client est cloué au pilori dans le monde entier depuis un mois et ne peut rien y faire. Malheureusement, en tant qu'avocat de la défense, il y a peu d'options pour faire face au refus du procureur d'inspecter les dossiers tant que l'enquête n'est pas terminée.

À notre avis, les enquêteurs n'ont pas nommé Christian B. pour qu'il ne puisse pas avoir accès au dossier. En même temps, les enquêteurs ont donné tellement de détails qu'on a compris de qui il s'agissait. Qu'en pensez-vous ?
Je suis d'accord avec vous. Les enquêteurs ont exposé tant de détails que l'identité du suspect a fait le tour du monde en quelques heures. Revenir sur le fait de ne pas avoir donné le nom est ridicule. Le bureau du procureur de Braunschweig était clairement conscient de ce à quoi cela mènerait. Je suis convaincu que par cette démarche, le ministère public va au moins essayer d'influencer les décisions judiciaires à venir dans la suite des affaires de notre client. En tout cas, la supposition du procureur général parle en faveur de cette supposition.
 
Qu'est-ce que vous entendez par là ?
Notre client avait purgé les deux tiers d'une peine de prison pour trafic de stupéfiants à l'établissement pénitentiaire de Kiel quelques jours après le premier appel à témoins sous la rubrique "Affaire numéro XY non résolue ..." et pouvait donc demander une libération anticipée, ce qu'il a fait. Une décision est également attendue concernant une procédure de révision qu'il a engagée après avoir été condamné pour viol au Portugal. La Cour européenne de justice est actuellement saisie d'une question juridique découlant de la procédure d'appel.

Comment évaluez-vous les preuves actuelles dans l'affaire Maddie ?
Je ne peux pas vous donner une réponse solide à cette question sans avoir examiné le dossier d'enquête. Je pense que le ministère public n'a pas grand-chose en main, qui puisse être utilisé pour prouver le fait dans un procès principal. Si tel était le cas, le procureur chargé de l'enquête pourrait inculper notre client ou demander un mandat d'arrêt préventif. Pour déposer un acte d'accusation, il faut ce que l'on appelle un "soupçon suffisant de crime" après la fin de l'enquête. En bref, c'est le cas si une condamnation dans un procès principal semble plus probable qu'un acquittement. S'il n'y a pas de soupçon suffisant, le ministère public doit mettre fin à la procédure conformément au paragraphe 170, alinéa 2, du code de procédure pénale. Le tribunal devant lequel l'acte d'accusation est déposé - ici, il s'agirait du tribunal régional de Braunschweig - doit alors d'abord examiner si, selon lui, il existe des soupçons suffisants. Si tel n'est pas le cas, le tribunal refuse d'ouvrir la procédure principale contre l'accusé.
 
Vous avez déclaré que vous considérez les déclarations faites par le bureau du procureur de Braunschweig comme "étrangement risquées". De quelles déclarations parlez-vous ?
Je pense qu'il est audacieux de rendre publique l'affirmation que notre client a tué Madeleine McCann sans sembler pouvoir le prouver. Au lieu de procéder avec sensibilité et prudence, les enquêteurs de Braunschweig s'emparent du plus intime d'un de leurs semblables avec des doigts épais. Lorsque je fais une telle déclaration, je dois être conscient de ce qu'elle signifie pour les parents de la jeune fille, mais aussi pour l'accusé. Une sentence d'un procureur suffit désormais à détruire irrévocablement l'existence, la réputation et la vie d'une personne. Imaginez qu'en fin de compte, le procureur de Braunschweig doive admettre que l'enquête doit être arrêtée. Même après sa libération, Christian B. serait marqué au fer rouge pour le reste de sa vie - dans le monde entier. Il n'y a pas non plus beaucoup d'aide pour mettre fin à la procédure. Je vois aussi le danger que le procureur soit maintenant sous pression pour réussir. Le monde veut voir des résultats. Sous la pression, les contre-vérités aiment se mélanger. Même si les procureurs allemands portent un masque d'objectivité, puisqu'ils sont obligés d'enquêter, ce qui est également disculpant, il y a maintenant un risque supplémentaire : Les enquêteurs qui se sont fait tirer dessus à propos de Christian B. pourraient inconsciemment enquêter de manière unilatérale.
 
Comment avez-vous vécu votre client jusqu'à présent ?
Comme les médias le décrivent jusqu'à présent. Je le trouve un interlocuteur agréable.
 
Que dit-il des allégations "Maddie" ?
Ce dont l'accusé discute avec ses défenseurs en interne ne concerne personne d'autre. Si, à un moment donné, le procureur de la République propose un interrogatoire, ce qui est généralement la dernière étape de l'enquête, Christian B. invoquera son droit de garder le silence. Un avis, s'il y en a un, ne sera donné que par écrit via ses défenseurs. Nous l'avons déjà communiqué au procureur de la République.